Des astronomes, dont un jeune chercheur de l’Observatoire de la Côte d’Azur, viennent de mettre en évidence, dans les exoplanètes appellées "Jupiters chauds", des interactions intenses entre circulation atmosphérique, contraste de température jour/nuit et formation de nuages. Les Jupiters chauds orbitent en quelques jours autour de leurs étoiles hôtes. Pour la plupart d’entre elles, les forces de marées ont synchronisé leurs périodes de rotation et de révolution. Comme pour la Lune et la Terre, elles montrent toujours la même face à leur étoile. Ces travaux font la couverture de la revue Astronomy & Astrophysics cette semaine.
Carte de vents (flèches) et de températures (couleurs) issu d’un modèle de circulation générale d’un Jupiter-chaud. Le point substellaire est à la longitude zéro. On voit que la circulation est dominée par des vents allant d’ouest en est. De plus l’hémisphère le plus chaud est décalé d’une vingtaine de degrés vers l’est par rapport au point substellaire. Crédits : V. Parmentier/OCA/CNRS/Université Nice Sophia Antipolis.
Le côté « jour » des Jupiter-chauds, perpétuellement éclairé, est plusieurs centaines de degrés plus chaud que le côté nuit, plongé dans l’ombre. Le contraste de températures entre le jour et la nuit est telle que certaines espèces peuvent être stable du côté jour, mais être forcées à condenser du côté nuit. C’est, par exemple, le cas des silicates (le verre), des oxydes de fer ou bien des oxydes de titane. De plus, sur ces planètes, des vents soufflant d’ouest en est transportent le gaz du côté jour au côté nuit en moins de 24h. Quel est le devenir des espèces qui sont transportées et condensent côté nuit ? Si elles pleuvent trop profond dans l’atmosphère, elles disparaissent rapidement, du côté nuit comme du côté jour de la planète. Par contre, si la circulation atmosphérique est assez puissante pour les ramener dans la haute atmosphère, elles restent disponibles à la fois pour être observées côté jour et pour former des nuages côté nuit. Plus les flocons côté nuit sont gros, plus ils chutent vite dans l’atmosphère et plus il devient difficile pour la circulation atmosphérique de les ramener dans l’atmosphère visible. En utilisant un modèle de circulation générale de l’atmosphère d’un Jupiter-chaud, les auteurs de cette étude ont montré que si un composé gazeux condense dans des particules de plus de quelques microns, il devrait rapidement disparaître de l’atmosphère visible et être stocké dans les profondeurs inobservables de la planète. Au contraire, si la taille des condensats est plus petite que le micromètre, une brume pourrait se maintenir dans la haute atmosphère.
Vue d’artiste de l’exoplanète Kepler-7b. Bien que possédant un rayon 1,5 fois plus grand que Jupiter, Kepler-7b est deux fois moins massive. Crédits : NASA/JPL-Caltech/MIT
Certaines observations sont venues confirmer la présence de nuages sur tout ou parties de certains Jupiter-chauds. Par exemple, une brume couvrant l’intégralité de la planète HD189733b, composée de particules d’au maximum un dixième de micromètre a été découverte en mesurant la lumière transmise par la planète durant son transit(1) et, plus récemment, en mesurant la lumière de l’étoile réfléchie par la planète(2). A contrario, sur Kepler-7b, un autre Jupiter-chaud, des nuages ont été découverts dans la partie ouest du côté jour mais pas dans la partie est(3). Comme pour la plupart des Jupiter-chauds, la circulation atmosphérique de Kepler-7b est dominée par des vents rapides d’ouest en est. L’ouest du côté jour est composé d’air froid et nuageux en provenance du côté nuit tandis que l’est du côté jour est composé d’air chaud et transparent en provenance du point substellaire ce qui favorise un ciel couvert à l’ouest mais un ciel clair à l’est du point substellaire.
Dans le futur, la mission spatial EChO(4) pourra, si elle est sélectionnée, cartographier des dizaines de Jupiter-chauds dans une centaine de longueurs d’onde différentes, permettant une compréhension plus profonde de la météo des planètes extra-solaires.
Note(s) :
- 1. The prevalence of dust on the exoplanet HD189733b from Hubble and Spitzer observations, Pont et al., MNRAS 2013(http://mnras.oxfordjournals.org/content/432/4/2917.abstract)
- 2. The deep blue color of HD189733b : Albedo measurements with HST/STIS at visible wavelengths, Evans et al. ApJ 06/2013 (http://iopscience.iop.org/2041-8205/772/2/L16)
- 3. Inference of Inhomogeneous Clouds in an Exoplanet Atmosphere, Demory et al., ApJ 10/2013 (http://iopscience.iop.org/2041-8205/776/2/L25/)
- 4. En savoir plus sur la mission EChO de l’ESA qui permettra de caractériser spectralement les exoplanètes.
Source(s) :
Contact(s) :
Vivien Parmentier, Laboratoire Lagrange (Observatoire de la Côte d’Azur/CNRS/Université Nice Sophia-Antipolis)vivien.parmentier@oca.eu, 04 92 00 30 81.
Les coordonnées ci-dessus peuvent avoir été mises à jour depuis la publication de cet article.